04 janvier 2025
L'Éditorial du 4 janvier 2025
« L’Europe entre le marteau et l’enclume
L‘Europe a aujourd’hui impérativement besoin d’être forte et unie, ce que malheureusement elle n’est pas. Celui que l’on appelait son « moteur », le couple franco-allemand, est à l’arrêt depuis bien longtemps. Les différences d’approches sur moult problèmes entre les deux pays, les erreurs commises par leurs dirigeants – Scholz et Macron – qui en font aujourd’hui des responsables politiques sans force ni crédibilité, leurs économies à la peine, ont contribué à fragiliser voire à casser une mécanique qui avait fait ses preuves. Au surplus, certains pays, pas forcément les plus importants mais quand même, tels la Hongrie et son dirigeant populiste Orban ou la Slovaquie de Fico, jouent ouvertement la carte de la Russie.
Une Russie dirigée par un criminel de guerre dont l’armée massacre des civils, enlève des enfants, utilise des armes chimiques ou le viol comme arme de guerre, bombarde et détruit des villes entières et des installations de première nécessité au mépris des conventions internationales. Et fait massacrer des centaines de milliers de ses compatriotes. Un pays qui commence à ressentir durement les effets de cette guerre qu’il a lui-même déclenchée : les signes d’une brusque dégradation de la situation économique se multiplient. Les sanctions occidentales commencent à produire leurs effets. La stagflation menace, l’inflation est plus de 9 %, la hausse des prix est plus de deux fois ce qu’avait prévu le Kremlin. De ce fait la banque centrale a été contrainte d’augmenter son taux directeur à 21 %, et conséquemment les taux des banques frôlent les 30 % alors que le rouble plonge.
Est-ce pour autant suffisant pour que Poutine mette un terme aux hostilités ? Pas vraiment si l’on en croit un diplomate en poste en Europe de l’est, cité par le Canard Enchainé : « Tout comme Netanyahou à Gaza, Poutine n’a peut-être pas intérêt à une paix qui le mettrait, sur le plan intérieur, face aux conséquences de son « opération spéciale ». En particulier le nombre faramineux de morts ». Cette guerre qui sévit aux portes de l’Europe est peut-être loin de s’achever même si agresseur et agressé n’en peuvent plus. Ce criminel qui la menace représente toujours un risque sérieux et l’Europe pourrait bien se mordre les doigts de ses atermoiements, de son indolence et de son impuissance à armer l’Ukraine.
De l’autre côté de l’Atlantique, la situation bien que radicalement différente n’engendre pas non plus l’optimisme. L’élection d’un personnage aussi fantasque que Trump, irrationnel, n’écoutant ni ses conseillers ni personne si ce ne sont ses préjugés souvent douteux, introduit une multitude d’inconnues qui rendent l’avenir à tous niveaux plus qu’incertain, sinon inquiétant. Enfin si, il écoute quelqu’un, pour l’instant (et jusqu’à quand ?) mais il n’est pas certain (euphémisme !) que ce soit la meilleure des choses pour l’Europe : Musk. Lequel ne sera pas l’homme qui ne le modérera ni ne le mettra sur la voie de la sagesse, ou celle de la raison et de l’équilibre. Surtout dans la mesure où cet Elon Musk se révèle être un boute-feu de la pire espèce.
Il fait aujourd’hui le sale boulot pour le compte de Trump en ciblant, notamment grâce à son réseau social, de préférence les dirigeants-sociaux-démocrates, tel Olaf Scholz et le Président de la République fédéral d’allemagne, Frank-Walter Steinmeier qualifié de « tyran antidémocratique ». Ou le travailliste Keir Starmer, premier ministre britannique accusé d’avoir étouffé une vaste et sordide affaire de viols de mineures perpétrés par des gangs d’émigrés pakistanais ! Et surtout en menant une offensive antidémocratique et antieuropéenne d’une grande virulence, une tentative de déstabilisation et de dénigrement inédite à ce jour. Offensive qui se concrétise par exemple par des appels aux électeurs allemands à voter pour le parti d’extrême droite Alternative für Deutschland aux législatives du 23 février ; ou bien en réclamant de nouvelles élections au Royaume-Uni en offrant de financer certains partis populistes proches de la droite extrême. Mesdames Le Pen et Meloni doivent en frétiller d’aise. Poutine ne fait pas mieux.
Situation ahurissante qui voit un homme d’affaires, ne possédant même pas la nationalité américaine, prendre des initiatives politiques internationales qui ne sont ni plus ni moins que de l’ingérence grossière, avec la bénédiction du Président élu des Etats Unis, par ailleurs condamné par la justice pénale de son pays ! Au surplus un chef d’entreprise enrichi par les contrats publics et qui a financé l’élection de ce dernier à hauteur d’un quart de milliards de dollars. Bref le conflit d’intérêt est patent. Cet étrange attelage constitue une menace directe pour l’Union Européenne et pour les démocraties qui la composent. (Mais ils étaient invités par Macron à la cérémonie de réouverture de Notre-Dame !)
Il est certainement temps de paraphraser Philippe le Hardi lorsqu’il interpellait son père, le roi de France Jean Le Bon : Europe, gardez à vous à l’est. Europe, gardez-vous à l’ouest !
Jacques Lavergne / 04-01-25 / Radio web Esprit Occitanie
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